Palestinien réfugié en France depuis quelques années, Al-Husseini préside le “Conseil des ex-musulmans de France”,
composé “d’athées, de libre-penseurs, d’humanistes et d’ex-musulmans
qui prennent position pour encourager la raison, les droits universels
et la laïcité”. Il vient de publier un livre au titre éloquent : Une trahison française – Les collaborationnistes de l’islam radical devoilés* (Editions Ring). Dans son précédent ouvrage, Blasphémateur ! Les prisons d’Allah*
(Grasset 2015), il racontait son parcours, qui l’a conduit de Qalqilya
en Cisjordanie, à Paris, où il a trouvé refuge après avoir connu les
geôles de l’Autorité palestinienne.
Contrairement
à un cliché qui a la vie dure en Occident, l’Autorité palestinienne de
Mahmoud Abbas n’est pas plus laïque et tolérante que le régime dirigé
par son rival, le Hamas, dans la bande de Gaza… En 2010, Waleed
al-Husseini a ainsi été emprisonné pendant 10 mois par l’Autorité
palestinienne, accusé du “crime” d’avoir publié sur son blog des
articles critiquant l’islam et revendiquant son identité de Palestinien
athée. Ayant fui l’obscurantisme et les tortures dans sa patrie
palestinienne pour se réfugier en France, Al-Husseini relate dans son
dernier livre la déception qu’il a éprouvée à l’égard de son pays
d’accueil, dans laquelle il pensait trouver un havre de liberté et de
défense de la laïcité.
En même temps que le récit de ses déconvenues, Une trahison française est
une analyse décapante et convaincante de la somme de faiblesses,
d’incompréhension, de compromissions intellectuelles et politiques et de
lâcheté, qui ont abouti à la situation actuelle. Le livre
d’Al-Husseini, sous-titré “Les collaborationnistes de l’islam radical
dévoilés”, ne contient pourtant aucun nom de ces “collabos”. Il ne
s’agit pas d’un pamphlet ou d’un brûlot anti-islam, mais d’un ouvrage de
réflexion et d’analyse, qui offre un tableau informé de la situation de
la France à l’égard de l’islam. Observateur venu d’un pays musulman,
Waleed al-Husseini porte un regard lucide et acéré sur l’état actuel de
la France, ne s’encombrant pas de précautions oratoires pour dire ce
qu’il pense et nommer les choses par leur nom.
Il rejette ainsi la notion d’un “islam modéré”, tout comme il récuse l’idée que l’islam serait majoritairement pacifique.
“En arrivant en France, relate-t-il, j’ai
découvert le terme de ‘musulman modéré’, alors que dans ma Cisjordanie
natale, ce terme n’existe pas, comme il n’existe pas dans les autres
pays arabes et musulmans”.
Sa
critique ne vise pas seulement les manifestations contemporaines de
l’islam politique et guerrier (des Frères musulmans à Daech) mais
remonte aux fondements d’une religion qui a d’emblée mêlé le politique
et le religieux et n’a pas (encore?) réussi à accomplir sa réforme. Face
à l’Etat islamique, l’erreur commise par les grandes puissances est
selon lui de vouloir “éradiquer Daech, en tant que mouvement terroriste
extrémiste”, sans s’attaquer à “ce que véhicule son idéologie, qui n’est
autre que l’islam”. Cette affirmation radicale est toutefois tempérée
par la distinction qu’il établit entre l’islam, foncièrement violent, et
les musulmans : “Daech représente l’islam dans sa forme politico-religieuse, et non les musulmans en tant qu’individus”.
Al-Husseini
ne rejette pas pour autant la possibilité d’une réforme de l’islam,
qu’il appelle de ses voeux. Mais celle-ci ne pourra venir à son avis
qu’après la défaite de l’islam politique. On est très loin du discours
apaisant sur l’islam de la plupart des politiques et des intellectuels
français, auxquels il ne ménage pas ses critiques. Le reproche principal
qu’il leur adresse est d’avoir cédé sur la laïcité, principal rempart
de la République contre la vague montante de l’islamisation. Au
lendemain des attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper casher,
explique-t-il, “certains
politiciens ont eu le culot de réclamer la réforme de la loi sur la
laïcité pour la conformer aux exigences des musulmans”.
Cette
“trahison” est avant tout, à ses yeux, celle des intellectuels français
(de gauche notamment), dont la plupart n’ont jamais fait l’effort de
comprendre l’islam et son projet politique. Il fait ainsi remonter la
“décadence des intellectuels français” au soutien manifesté par Michel
Foucault à la révolution islamique en Iran, dès 1978. Parmi les causes
de cette cécité volontaire, Waleed al-Husseini pointe également du doigt
le pacifisme de l’Occident, qui a “sacrifié ses valeurs” de laïcité et
d’égalité des sexes, au nom de la cohabitation avec l’islam. Rejoignant
l’analyse de la philosophe Alexandra Laignel-Lavastine, il estime ainsi
que la peur du terrorisme et le refus de la guerre sont parmi les causes
des victoires de l’islam en Occident.
Livre
de combat, Une trahison française est un appel salutaire à une
véritable défense active de la laïcité, “avant qu’il ne soit trop tard”.
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